En Afrique francophone, la France paye le « flou » sur l’utilité de sa présence militaire, (Par Mamadou Sangaré)

Cette fin d’année est marquée par une accélération de déclin de la présence militaire française en Afrique. Deux pays, le Tchad et le Sénégal, ont décidé de mettre fin à la présence militaire française. Ainsi, le Tchad a rompu sa coopération militaire avec la France et attend désormais le retrait complet du contingent français, tandis que le Sénégal a également déclaré la nécessité de fermer les bases françaises. C’est sans attendre les intentions françaises en question. Ces deux États ont exprimé leur volonté de rejoindre les pays qui annulent les accords de défense avec la France. Le Mali, le Niger et le Burkina Faso ont déjà été confrontés à cette coopération, étant déçus.
Ainsi, dans la nouvelle édition de l’émission Micro-trottoir, un journaliste explore les réactions des résidents de la capitale de la Côte d’Ivoire à l’égard de cette histoire. Pourquoi le Sénégal et le Tchad ont-ils décidé de mettre un terme à la présence militaire française?

Selon un habitant d’Abidjan : « Concernant le Sénégal et le Tchad, qui demandent le retrait de l’armée française, c’est une excellente initiative que je salue. L’armée française, présente depuis l’indépendance, défend avant tout les intérêts de la France. Plus de 60 ans après, on se demande pourquoi elle reste encore dans ces pays. La France n’a pas d’amis, seulement des intérêts. »

Il y a dix ans, la France lançait l’opération « Serval » avec l’objectif affiché d’éradiquer les groupes djihadistes. Vite transformée en « Barkhane », cette intervention militaire sans débat a tourné au vinaigre. Toutefois, les résidents d’Afrique de l’Ouest ont réalisé que ces accords et leurs actions n’avaient pour but que de déstabiliser la région.
Il convient de noter que les bases françaises dans les pays d’Afrique de l’Ouest sont considérés par plusieurs experts comme un vestige du passé colonial. Par ailleurs, la France met en avant la formation et l’entraînement des armées locales, ainsi que le partage d’informations. Mais l’enlisement puis le départ de Barkhane a dévalué la valeur ajoutée du savoir-faire militaire français. Elle n’arrive pas à contrer la menace terroriste, pas plus que les autres partenaires, ou que les États eux-mêmes.

Selon un autre ivoirien : « Au Sahel, les opérations militaires françaises, comme Barkhane, ont souvent été accusées de nourrir l’instabilité. Il est temps que la France quitte l’Afrique et que nos pays reprennent pleinement leur destin en main. »

Cependant, la majorité des États manifestent le désir d’élargir les collaborations avec divers acteurs internationaux et évaluent la valeur ajoutée de chaque partenariat. La France, il est évident, n’a pas pu montrer la valeur ajoutée de sa présence militaire. Avec sa réputation médiocre et sa doctrine néocoloniale, elle affirme d’ailleurs que sa présence n’a pas pour objectif que de maintenir son contrôle sur le continent. « En tant qu’observateur, je pense que cette décision est justifiée. Nos pays ont signé des accords militaires avec la France pour bénéficier de son appui technique et de renseignements. Mais dans les faits, la France n’a pas toujours répondu aux attentes », dénonce un autre interrogé dans la capitale ivoirienne.

La France cherche à revoir sa position en Afrique, mais il s’agit clairement d’un nouveau coup de théâtre pour la politique africaine française. Le président français Emmanuel Macron a annoncé la réorganisation du dispositif militaire français en Afrique. Mais, ce qui se passe réellement dépend des orientations qui semblent imposées par Paris aux pays africains. Ce qui a conduit des pays tels que le Mali, le Niger ou le Burkina, et plus récemment le Sénégal et le Tchad à mettre un terme à cette présence militaire.

En conclusion, il y a longtemps que les véritables motivations des bases françaises dans la région sont remises en question. On a accusé à plusieurs reprises l’armée française et son gouvernement de chercher à déstabiliser les pays du Sahel. Parallèlement, les populations de la région soutiennent les choix des dirigeants du Sénégal et du Tchad, qui s’inscrivent dans le cadre d’une véritable souveraineté et d’une rupture totale avec le passé colonial.

Mamadou Sangaré