À la loupe- Fête du travail : Les oubliés du 1er Mai

Par Assane Seye On Mai 2, 2023

Hier, à l’instar du monde ,les travailleurs du Sénégal ont célébré la fête du travail. Un moment de marquer un temps d’arrêt afin de voir à la loupe avant les doléances, les mots qui gangrènent chaque corps de métier. Dans cette fourchette à dent multiples notre regard s’attarde sur un métier des plus éprouvants mais »oublié » à savoir celui d’employés de maison.
existerait un peu plus 80 000 employés de maison au Sénégal, composés majoritairement de domestiques, d’après l’enquête statistique nationale sur le travail des enfants de Juillet 1993.
Néanmoins, l’importance du nombre d’individus qui exercent ce travail d’employé de maison, qui dans les normes devrait être un facteur de promotion et de stabilisation de l’emploi n’est que la partie visible de l’iceberg, les conflits, le caractère informel, ainsi que la précarité, qui est pourtant un point prépondérant de travail entre employeurs et employés de maison. demeure judicieux de voir comment l’exode rurale a donné une proportion considérable à ce métier avec ce flux d’hommes et de femmes qui quittent leur village pour rejoindre les pôles urbains en espérant une vie plus descente chose qu’ils ne pensent en restant dans les zones rurales tournées exclusivement vers des activités agropastorales.

Cet échec cuisant de l’économie du à une mauvaise répartition des richesses draine aujourd’hui ce beau monde livré à lui-même dans un environnement parfois »sans foi,ni lois ». Fatou ( nom d’emprunt ) assise sur un banc en face de la gendarmerie de la foire avance dans un wolof un peu éméché << je viens de Sakhor, je suis venue chez ma tante à Dakar dans le but d’obtenir un travail.
Au village je ne fais qu’aller au champ et cela ne rapporte pas grand chose. J’ai décidé de venir tenter ma chance. Mes amis qui sont déjà ici comme employés de maison envoient chaque mois leur soutien financier à leurs familles…..>>.

Comme Fatou ,la majorité de ces personnes sont animées d’un vent d’espoir.Une espérance très souvent déçue lorsque la réalité s’octroie sa revanche. En effet, engagés souvent sans contrat ,ils sont à la merci de leurs employés avec des conditions de travail execrables la plupart du temps. Selon Madame Kuame propriétaire d’une agence de placement les sévices sont souvent gravissimes au point que l’agence demande à l’employé de porter plainte.Moulée d’une robe rouge 3/4 cheveux enturbannés madame Kuame sur un air furieux :<< jai eu le cas d’un jeune homme très sérieux à qui j’ai trouvé un travail de boy de maison.

La femme qui l’a engagé a donné un pourboire plus que généreux mais nous ne pouvions imaginer que elle faisait ainsi les yeux doux à son employé.En une semaine ce dernier a préféré partir mais pour se venger elle l’a accusé de vol. J’ai accompagné ce jeune durant toute la procédure et heureusement il a été blanchi après avoir sorti les messages de sa patronne. Ce type de cas ne sont anodins. Cela m’a vraiment marqué…>>.À la question de savoir si toutes les agences bénéficient de ce type de soutien de leur agence de placements ,Madame Kuame se dit dubitative.<< ici dès qu’on vous trouve un emploi et que l’agence obtient son pourcentage sur votre premier salaire, on a plus de liens.>> poursuit Aïcha Sylla gestionnaire d’une entreprise de placements aussi.

Ndeye Djegui trouvé dans la salle d’attente de cette entité enfonce le clou :<< je travaillais pour une maghrébine, elle me payait bien mais j’avais pas le droit de manger sa nourriture. À l’heure du repas ,je sors en acheter. Je n’ai pas de pause je travaillait en plus des insultes que je subissais. Une véritable violence psychologique.J’ai arrêté et je cherche un autre travail ici espérons que je ne retombe sur ce type de femme….>> termine t-elle dans un éclat de rire contagieux.

Quand est-il de la position du droit de ces employés de maison dans le droit sénégalais. Le verre dans le fruit reside dans la compréhension d’un fait: ces travailleurs intervenant dans le cadre restreint du domicile sont qualifiés d’employés de maison, d’autres épithètes sont censées les désigner : gens de maison, travailleurs domestiques, employés à domicile, femmes de ménage voire employés familiaux.
La notion même de domicile en droit mérite qu’on s’y attarde un peu. Certes l’Inspection du Travail s’applique à toutes les situations d’emploi, mais dans la pratique, le domicile privé est en dehors du champ d’application des inspecteurs du Travail. Cela est d’autant plus vrai que l’article 16 de la Constitution sénégalaise est sans équivoque lorsqu’il insiste sur le caractère inviolable du domicile.
Elle dispose plus loin qu’on ne pourra porter atteinte à cette inviolabilité que pour parer à un danger collectif ou pour protéger des personnes en danger de mort.

Plus loin on voit que dans la pratique, les rémunérations que perçoivent les domestiques et gens de maison ne sont pas imposées au Sénégal. C’est parce que souvent à la base de la relation contractuelle, il n’ya pas d’écrit.L’application de l’arrêté précité et la convention 189 des nations unies, conduit sans nul doute à une imposition à l’impôt sur le revenu (IR), des revenus du travailleur domestique. Dans cette hypothèse, il est un salarié. Donc il est d’office exclu, l’application de la retenue de 5%. Ces employés ne bénéficient donc pas de la caisse de prévoyance sociale. Ils sont les grands »oubliés » du 1er Mai.

Sara Jupiter-Senegal7