Cheikh Omar Hann, dg du COUD : «Nous devons aux restaurants universitaires une facture de 4 milliards FCfa»

Le Directeur général du Centre des œuvres universitaires de Dakar (Coud) explique dans cet entretien la situation qui prévaut dans le campus social, notamment les problèmes avec les repreneurs des restaurants de l’Ecole supérieure polytechnique (Esp) et de l’Ensetp (Ecole nationale supérieure d’enseignement technique et professionnel). Cheikh Omar Hann évoque également les perspectives de la Direction, ainsi que les projets en cours.

Vous êtes Directeur général du COUD depuis 2014, comment se porte la structure ?

Nous travaillons avec une équipe que nous avons trouvée sur place, pour assurer le service des œuvres universitaires des étudiants des Universités de Dakar, Thiès, Bambey et Ziguinchor. Nous le faisons dans le respect des missions qui nous sont attribuées. Nous travaillons à apaiser l’espace universitaire, en mettant en place un dispositif de dialogue et de communication avec nos différents partenaires, à savoir, les travailleurs et leurs organisations, les étudiants et leurs représentants. Nous considérons que depuis un certain temps, dans les différents campus sociaux, particulièrement à Dakar, nous avons une stabilité, relativement à ce qui se faisait. Nous continuerons à œuvrer en mettant en place des canaux qui nous permettront de communiquer et de résoudre les problèmes.

Pouvez-vous nous faire le bilan de l’année 2016, qui tire à sa fin?

Cette année, nous avons servi 25 millions de repas aux étudiants. Nous leur avons assuré une couverture médicale convenable, de même que l’hébergement, qui s’est fait avec une amélioration des immeubles. Nous avons eu à gérer 1042 lits cette année, en plus de ceux qui existaient déjà. Nous avons encadré les étudiants en nous impliquant davantage dans la vie estudiantine, nous les avons aussi accompagnés au plan culturel et sportif. Il faut retenir que nous sommes dans une perspective de construction et d’élargissement de nos capacités d’accueil et de restauration des étudiants. Nous avons, dans ce sens, initié la restauration express et nous en sommes à la phase de démarrage effectif.

En quoi consiste la restauration express exactement ?

Il s’agit de choisir des intervenants dans le domaine de la restauration, qui vont venir, parallèlement aux restaurants classiques du campus, proposer des plats avec des prix convenables, pas subventionnés mais négociés avec le repreneur. Ce, dans l’objectif de proposer autre chose aux étudiants, comme cela se fait dans les grandes universités du monde.

Dernièrement, on a noté un mouvement d’humeur des étudiants de l’Ecole supérieure polytechnique (Esp), suivie d’une sortie du repreneur du restaurant, quel est réellement le problème?

La restauration universitaire est gérée avec des repreneurs qui sont des privés à qui nous confions notre mission de servir des repas aux étudiants, sur la base d’un cahier de charges et d’un appel d’offres fait sur la base du Code des marchés publics. Cette année, nous avons eu des difficultés avec les restaurants de l’Esp et de l’Ensetp, parce que nous avons eu des problèmes pour faire démarrer les repreneurs, qui considéraient qu’on leur devait de l’argent. En réalité, nous devons au repreneur du restaurant de l’Ensetp environ 70 millions FCfa, nous lui avons fait une avance de 40 millions. A celui de l’Esp, nous devons à peu près 140 millions FCfa et nous avons fait une avance de 70 millions. Il faut savoir qu’aujourd’hui, la facture que nous devons aux restaurants universitaires s’élève globalement à 4 milliards FCfa. Mais c’est une situation normale. Les procédures de facturation font que nous payons après le service et comme nous débutons l’année, nous sommes dans une situation financière où le service des repas servis du mois d’octobre au mois de décembre est payé dans le budget de l’année suivante. Mais l’Etat fait des efforts en nous octroyant des apports budgétaires pour régler au besoin ces situations. C’est ce qui nous a permis d’ailleurs de régler les factures de ces deux repreneurs. Mais les raisons pour lesquelles ceux de l’Esp et de l’Ensetp n’ont pas repris, n’ont rien à voir avec le contrat qui nous lie ni avec la pratique dans le campus universitaire. Nous considérons qu’ils gèrent des restaurants à petite capacité, qui nécessitent une rigueur et des capacités financières que ces fournisseurs ont des difficultés à nous prouver. C’est d’ailleurs la première fois dans l’histoire du Coud qu’on est confronté à des repreneurs à qui on fait des avances de démarrage en début d’année et qui refusent de reprendre le service. L’Esp et l’Ensetp sont des écoles de formation, les étudiants ont eu à faire une grève pour que les restaurants démarrent, et depuis le mois d’octobre, nous avons envoyé des lettres à ces repreneurs pour leur demander de démarrer, ce qu’ils ont refusé.

Mais le repreneur de l’Esp dit que vous lui avez écrit une lettre pour lui dire de démarrer le lendemain, ce qu’il n’était pas en mesure de faire…

Ce n’est pas la réalité. Ce qui se passe est que nous lui avons demandé de démarrer depuis le 2 novembre, mais il a refusé, sous prétexte que nous lui devions de l’argent. Ce qui n’est pas acceptable du point de vue de la pratique et des rapports que nous avons avec les fournisseurs. Nous ne pouvons pas transiger sur la continuité du service. Mais nous sommes contraints aussi par le Code des marchés. Nous avons insisté pour qu’il reprenne, mais il a exigé une avance. Ce que nous avons fait en lui octroyant une avance de près de 70 millions FCfa.

Le repreneur affirme n’avoir reçu que 30 millions…

Non. Nous lui avons d’abord fait un chèque de 30 millions FCfa et l’autre est au niveau du Trésor, il le sait. Et la reprise n’est pas liée au paiement des chèques. Suivant le cahier de charges, les repreneurs se font accompagner par les banques, et dans de pareils cas, nous prenons des engagements auprès de ces banques. Si le repreneur est dans les conditions financières requises pour exécuter un marché, les banques l’accompagnent. Je vous dis que nous avons des encours de 4 milliards FCfa avec les autres repreneurs, mais n’empêche, tout le monde a repris, sauf ceux de l’Esp et de l’Ensept. Et de plus, ils en ont fait une bataille médiatique, ce qui ne se fait pas, au regard du caractère la sensible du secteur. Nous ne leur devons pas de l’argent qui les empêche de fonctionner, s’ils respectent le cahier de charges. Ils se sont aussi mis à parler aux étudiants. Ce qui est formellement interdit. C’est le Coud qui doit le faire. Ils ont refusé de démarrer le service et il y a eu une grève des étudiants, nous les avons reçus et leur avons expliqué que nous avons pris des mesures pour pallier cette situation en fonction de nos capacités. Nous avons fait en sorte d’ouvrir les restaurants de l’Esp et de l’Ensetp, et à notre grande surprise, le repreneur du restaurant de l’Esp, qui avait fait une conférence de presse pour annoncer qu’il n’allait pas reprendre le service, s’est présenté pour dire qu’il allait ouvrir. Celui de l’Ensetp aussi nous écrit une lettre pour dire la même chose. Nous avons considéré que le Coud ne pouvait pas se baser sur ces attitudes pour garantir le service des repas aux étudiants. Nous leur avons donc fait savoir qu’il relève de la prérogative du Coud de décider de la fermeture et de l’ouverture des restaurants, donc de la prise de service des repreneurs. C’est ainsi que nous avons demandé au repreneur de l’Esp, qui s’est présenté au restaurant le lundi, de quitter les lieux. Et nous allons faire courir les clauses du cahier de charges, que nous savons en notre faveur.

Vous avez donc rompu le contrat qui vous liait ?

Nous avons pris des mesures pour continuer le service des repas dans ces différents restaurants. Nous avons constaté un refus systématique de ces repreneurs d’exécuter le contrat qui nous liait, en reprenant service à l’ouverture de ces écoles, sous prétexte qu’ils n’en avaient pas les capacités. Alors que lorsque nous avons trouvé un accord et mis en place un dispositif pour faire démarrer les restaus, ils ont subitement eu les capacités. Ce que nous considérons comme un chantage, que la Direction du Coud ne pouvait accepter. Le contrat n’est pas en cours parce qu’ils n’en ont pas respecté les termes, nous considérons qu’il y a rupture du contrat, de leur fait.

Vous dites que vous devez 4 milliards aux repreneurs, comment comptez-vous éponger cette dette ?

J’ai dit que nous avons des encours à hauteur de 4 milliards FCfa. En fait, les repreneurs servent des repas. On fait la vérification du nombre de repas servis, on les certifie et on fait enfin la facturation. Ensuite, les factures sont traitées selon une procédure, avant paiement. Cette procédure peut prendre 45 jours. Il s’y ajoute que la gestion budgétaire de la trésorerie au Coud fait que pendant une période déterminée, on paie beaucoup plus rapidement que pendant une autre période. En 2015, nous avons payé 12,5 milliards FCfa aux repreneurs.

On constate que la restauration pose souvent problème à l’université, surtout du point de vue de la qualité, qu’est-ce qui explique cela ?

J’estime qu’on peut améliorer la qualité, personne n’en disconvient. Mais il ne faut pas oublier que nous sommes dans la restauration de masse. Les restaurants que nous gérons servent quotidiennement 40.000 repas. Les critères d’évaluation dans une restauration de masse sont différents de ceux d’une restauration familiale par exemple. Nous considérons toutefois que la qualité des repas servis est acceptable. Et il y a des commissions de contrôle de cette qualité, où les étudiants sont représentés. Nous avons mis en place tout un dispositif de contrôle. Nous faisons souvent des injonctions aux repreneurs pour qu’ils servent des repas de qualité.

Il y a aussi la distribution des lits, qui est source de problèmes, qu’en est-il cette année ?

Il y a un groupe d’étudiants qui a fait une sortie dans la presse la semaine dernière, pour dire qu’on est en train de distribuer les lits sans respecter les procédures et en favorisant les étudiants de l’Apr. La distribution des lits ne se fait même pas à cette période, elle se fait au mois d’avril. La dernière fois qu’on a distribué des lits, c’était en avril 2016. Les bénéficiaires sont détenteurs de ces lits jusqu’en avril 2017. Cela veut dire que dans cette période, d’octobre à novembre, parler d’acquisition de lits, c’est de la mauvaise foi. Ceux qui l’ont dit savent bien qu’il n’y a pas de distribution de lits à cette période. Dans le processus de distribution des lits, la direction du Coud gère, en étroite collaboration avec les représentants des étudiants. Il n’y a jamais eu de revendications à ce niveau. Dire qu’on donne des lits à des étudiants de l’Apr, alors qu’il n’y a pas de lits, c’est juste de la politique. Ceux qui ont parlé à la presse ne sont pas des étudiants, ils n’ont pas de carte d’étudiant. Ce sont juste d’anciens étudiants. C’est juste une tentative de déstabilisation de l’espace universitaire et cela ne passera pas, parce que nous avons pris les mesures idoines pour que cela ne se reproduise plus.

Il y avait aussi un projet de construction de nouveaux pavillons, où en êtes-vous ?

Il y a eu deux projets de construction de pavillons et ils ont démarré. Pour le premier, nous en sommes aux fondations. L’autre porte sur 18 mille lits et les travaux de terrassement sont en cours. Celui de 12 mille lits va démarrer en début d’année.

Quelles sont les perspectives de la direction du Coud pour 2017 ?

Nous considérons que nous allons atteindre un service des repas qui va tourner autour de 27 à 28 millions de repas dans l’année. Nous allons renforcer la rénovation des pavillons et aussi travailler à consolider nos rapports avec les différentes parties, les étudiants comme les travailleurs. Au niveau des œuvres sociales, nous sommes en train de construire des pavillons qui seront totalement équipés. Les anciens pavillons seront rénovés et mis aux normes internationales. Nous allons nous battre pour améliorer la qualité du service des repas, avec le démarrage de nouveaux restaurants. Pour le personnel du Coud, nous allons nous atteler à améliorer les conditions de travail. Nous allons renforcer l’outil informatique, renouveler le parc automobile et le mobilier de bureau. Nous allons aussi travailler pour le renouvellement du mobilier des cités universitaires.

Vous êtes responsable de l’Apr à Ndioum, comment se porte le parti dans cette zone ?

Le parti se porte très bien. Les dernières élections référendaires et celles du Haut conseil, ont montré que le parti est bien implanté dans la zone. Nous avons des activités politiques qui s’y déroulent correctement. On continue à faire le travail pour donner au Président de la République, Macky Sall, son deuxième mandat.

ADAMA DIENG