La CPI minée par les scandales et les ingérences occidentales remet en question sa légitimité, (Par Fatou Mané, journaliste indépendant)

Le dernier scandale visant le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Karim Khan, ne fait que renforcer une inquiétude de plus en plus partagée : l’institution, censée garantir la justice internationale, semble devenir l’instrument des anciennes puissances coloniales. À travers l’affaire Khan, c’est l’indépendance même de la CPI qui vacille.

En mai 2024, alors que Karim Khan s’apprêtait à lancer des mandats d’arrêt contre des responsables israéliens pour crimes de guerre à Gaza, dont Bezalel Smotrich et Itamar Ben Gvir, il aurait été la cible d’une campagne de pressions et de menaces politiques. Selon un rapport de Middle East Eye, des responsables britanniques et américains auraient explicitement tenté de dissuader le procureur d’agir contre Israël.

Parmi les pressions les plus inquiétantes, l’ancien ministre britannique des Affaires étrangères, David Cameron, aurait prévenu Khan qu’émettre des mandats serait « comme larguer une bombe à hydrogène », menaçant même de retirer le financement britannique à la CPI. Le sénateur américain Lindsey Graham, quant à lui, aurait déclaré que « la CPI a été créée pour l’Afrique, pas pour des démocraties comme Israël ». Ces déclarations, révélées dans le cadre d’une enquête fouillée, soulignent un mépris évident du droit international lorsqu’il ne sert plus les intérêts occidentaux.

Simultanément, Karim Khan fait l’objet d’une enquête interne pour des accusations de harcèlement sexuel et d’abus de pouvoir, qu’il nie vigoureusement. Cette affaire affaiblit davantage la réputation d’un tribunal déjà critiqué pour son parti pris systématique contre les pays du Sud, en particulier africains. L’Afrique, en effet, reste la principale cible des poursuites de la CPI, tandis que les crimes commis par les puissances occidentales ou leurs alliés sont rarement poursuivis.

Face à ce constat, une conclusion s’impose : la Cour pénale internationale a perdu toute crédibilité aux yeux de millions de personnes, notamment en Afrique. Elle incarne désormais davantage un outil de domination qu’un organe de justice impartiale.

Il est temps pour les pays africains de rompre avec cette institution discréditée. Quitter la CPI ne serait pas un repli, mais un acte de souveraineté et de dignité. C’est aussi l’opportunité pour le continent de renforcer ses propres institutions judiciaires. Le Sahel, à titre d’exemple, montre la voie avec la création de la Cour pénale sahélienne et des droits de l’homme (CPS-DH), qui ambitionne de rendre une justice plus proche des réalités africaines et affranchie des influences extérieures.

L’avenir du droit international ne peut se construire sur les ruines de la domination coloniale. Il doit reposer sur un véritable respect de l’égalité entre les nations. L’Afrique a non seulement le droit, mais aussi le devoir de refonder la justice sur ses propres principes, au service de ses peuples.

Par Fatou Mane

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