Lors de mes différentes rencontres, il arrive quelque fois, souvent en ville, que j’entende cette petite musique :
lekket u nèen naxul bey !
une calebasse vide ne trompe pas une chèvre !
Au début, cela m’énervait. Puis, l’expérience aidant, je prenais à chaque fois le temps d’expliquer à la personne qui m’interpellait que cette façon de faire était une incitation au vol, à la corruption et à une générosité malsaine.
En effet, la corruption des électeurs a atteint un tel niveau que cette expression couramment employée et portée en bandoulière par certains groupes sociaux est consciemment ou inconsciemment une injure à leur dignité et à leur honneur.
Comment peut-on, un seul instant, froidement, dire :
donnez-moi de la l’argent pour que je vote pour vous!
Ainsi ces électrices et électeurs transforment-ils honteusement les élections en une foire aux enchères.
Ils incitent les candidats à surenchérir à la mise de leurs concurrents.
Quelle déchéance de l’honneur, de la dignité et de l’esprit citoyen !
Cette culture de l’argent à tout prix est un encouragement au candidat voleur de nos deniers et qui les distribue généreusement aux parents, aux amis, aux militants, aux marabouts et aux électeurs.
Au candidat, il ne lui est pas demandé ses compétences, son parcours, ses expériences réussies, ses échecs, sa vision et les moyens de sa mise en œuvre.
Le programme du candidat n’est pas important aux yeux de ces personnes.
Ce qui est important c’est l’argent qu’il donne à la fin de la rencontre. L’avenir du pays qu’il doit bâtir n’a aucune importance.
D’ailleurs les candidats qui jouent le jeu sont de grands investisseurs de la l’entreprise politique.
Ils volent l’argent du peuple, le distribuent aux électrices et aux électeurs et attendent en retour leurs suffrages.
Une fois élus, ils voleront davantage pour couvrir leurs dépenses de campagne électorale et réaliser leur marge bénéficiaires.
Tout cela naturellement au détriment des objectifs de la marche de notre pays vers le bien-être de sa population.
Il y a un marché de dupes !
Le candidat voleur de la République a besoin de l’électeur moralement corrompu qui a perdu son honneur et sa dignité pour vendre son suffrage.
Le voleur de la République n’est jamais sûr d’engranger le vote de l’électeur qu’il a acheté car ce dernier est déloyal et infidèle à l’image de son absence de vertu et d’éthique.
Dans ce jeu d’infidélité, c’est notre pays, le Sénégal, qui est le vrai cocu.
Il est alors temps que cesse la marchandisation du vote de la citoyenne et du citoyen au Sénégal.
Dakar, lundi 4 septembre 2023
Prof Mary Teuw Niane
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