La primaire de la droite s’achevant, les soutiens du chef de l’Etat le poussent à se lancer sans attendre pour 2017. Mais Manuel Valls fait le forcing pour l’en dissuader, menaçant d’être candidat contre lui à la primaire de la gauche.
Ira ? Ira pas ? Alors que la primaire de la droite touche à sa fin, tous les regards se tournent vers François Hollande. Le chef de l’Etat s’est engagé à annoncer en décembre sa décision de briguer, ou pas, un second mandat. A moins de cinq mois d’une élection à très hauts risques pour la gauche, sa candidature apparaît « hautement probable » dans les rangs socialistes, tant il a envoyé, ces dernières semaines, des signaux de combativité. Mais sa situation est telle que rien ne peut être catégoriquement écarté. « La décision n’est pas prise », assure-t-on à l’Elysée. « Aucune solution n’est sans risque, aucune ne garantie un chemin facile, aucune n’emporte l’évidence », résume un ténor du gouvernement, qui ne l’imagine pas renoncer.
Ceux qui veulent l’empêcher au profit de Manuel Valls, qu’ils croient mieux placé pour éviter l’humiliation, ont intensifié leur offensive ce week-end. Malgré la présence de plusieurs de ses membres au gouvernement, le PRG a annoncé samedi la candidature de Sylvia Pinel en 2017, sans passer par la primaire de la gauche. Claude Bartolone, le président PS de l’Assemblée, a souhaité publiquement que le Premier ministre participe à la primaire contre François Hollande. Surtout, Manuel Valls, poursuivant sa stratégie de tension, n’a pas exclu de se lancer. « Notre primaire doit donner un élan, de l’espoir. Il faut de préparer au face-à-face [avec la droite en 2017]. Je m’y prépare, j’y suis prêt (…) Je prendrai ma décision en conscience », a-t-il dit au « JDD ». Le couple exécutif n’en est déjà plus un.
Les déclarations du Premier ministre, qui posent la question de son maintien à Matignon, ont d’autant plus provoqué la colère parmi les hollandais que Manuel Valls a lui-même rappelé – comme pour rouvrir la plaie – le « profond désarroi à gauche » créé par le livre « Un président ne devrait pas dire ça… ». « Si Valls y allait, ce serait Brutus puissance 1.000. Les Français ne le comprendraient pas », prévient un soutien du président. « L’heure est trop grave pour sombrer dans les politicailleries et l’égotisme. On ne peut pas passer sa journée à se poser en homme d’Etat et participer à ce triste spectacle », fustige un autre, raillant « la gauche la plus bête du monde qui va avoir plus de candidats qu’en 2002 ». « L’un ne se présentera pas contre l’autre », a tenté de rassurer dimanche, sur RTL, la ministre de l’Education, Najat Vallaud-Belkacem, les exhortant à… « se parler ».
Crise de nerfs
Les partisans du chef de l’Etat le pressent de se déclarer candidat très vite pour mettre fin aux manoeuvres des vallsistes et pour mieux se poser en rempart contre la droite. « Fillon a changé la dramaturgie. Il ne faut pas les laisser vivre trop longtemps l’état de grâce . Il faut installer le match », explique un lieutenant du président. « Ce n’est pas son ADN de renoncer », veut croire un ancien ministre. Certains le poussent aussi à passer outre la primaire de la gauche. Mais comment ? « ça ferait petit bras et apparaîtrait comme un acte de faiblesse. », avoue un de ses lieutenants. « Il a consciencieusement posé le piège et s’y retrouve pris lui-même », s’inquiète un ministre. « Le problème principal de Hollande, juge un lieutenant de Manuel Valls, c’est l’incarnation. Le lien avec l’opinion est cassé, sans capacité de rebond. Il ne suffit pas de dire »je suis le roi du monde » pour le devenir ».
A l’approche de la présidentielle, la gauche est une fois encore au bord de la crise de nerfs., menacée d’implosion Et François Hollande face à une équation compliquée. Déstabilisé par son Premier ministre, alors qu’il s’estimait conforté par les derniers résultats du chômage et voyait dans la victoire annoncée de François Fillon une aubaine pour réactiver le clivage droite-gauche. Ce lundi, admet un député, « c’est une autre partie qui commence. Avec ses risques… »
