Tanor est parti à jamais, laissant la République orpheline. Il ne posera plus son regard reflechi sur le siège du PS qui lui a tant donné.
C’est en 1978 que Tanor Dieng rencontra Senghor pour la première fois , devenant ensuite sa » plume » alors que l’ancien président de la république du Sénégal avait besoin de quelqu’un qui avait des connaissances pointues dans le domaine dz la diplomatie, quand bien même Senghor en avait il un regard appuyé.
Pour l’histoire, nous relate Tanor dans un hommage post mortem, Senghor faisait une distinction nette entre la » politique extérieure » qu’il définissait lui- même, et la diplomatie qui était l’exécution de cette politique et dont le ministre des Affaires étrangères avait la charge avec une relative autonomie.
Il ne m’a pas été donné de con- naître feu Ousmane Tanor Dieng qui bien qu’étant de son vivant un habitué des ors et lambris su palais, a toujours opté pour l’ombre et l’effacement alors qu’il lui était loisible de pavoiser. Mais, comme beaucoup de Sénégalais certainement, j’ai été frappé par sa mort , surtout subjugué par la finitude de la vie qui a eu raison d’un homme qui, de son vivant, fut si puissant et a donné tant de pouvoirs du seul fait de sa signature ou de son influence. Tout en lui faisait la différence entre le bruit et le son.
Au demeurant, et je le confesse, Tanor me seduisait par son silence qui bruissait en moi de mille interrogations sur ce qu’il pensait derrière ses épaisses lunettes, les secrets qu’il gardait, son masque de sérieux et de rigueur qu’il affichait toujours en public.
Lui arrivait- il de rire, surtout aux éclats ? Ses proches et amis d’enfance disent de lui qu’en prive, il aimait bien chahuter. De son vivant, un tel spectacle ne s’offrit jamais à moi.
Muet d’un silence audible, Tanor incarnait la République dans toute sa rigueur. Placide, parfois impassible, im adorait surtout faire régner l’ordre et la discipline, les règles de la bienséance et de la préséance n’étant pas negociables selon sa foi inébranlable, la somme de ces expériences professionnelles.
Dès lors, pouvait-on s’étonner que l’ex président Abdou Diouf n’ exprimât pas un seul mot à Paris comme le lui demandaient certains journalistes. Diouf a préféré se taire comme il s’est toujours tu, vivant seul sa souffrance, profonde, tant il est vrai que les témoignages post mortem sont comme de la tartine : moins on en a, plus on en étale . Ceux qui savent réellement se taisent toujours. Ils préfèrent faire le bien et laisser dire…
En réalité Diouf et Tanor semble être leq deux cotés d’une même pièce. C’est à pile ou face. Tu perds l’un pour gagner l’autre.
Ce n’est pas pour rien qu’après avoir été choisi par Senghor pour le suppléer à la tête de l’Etat et du parti, Abdou Diouf à son tour, en fit de même pour Tanor au moment où le PS était l’objet de tant de convoitises. Ce congrès de 1996 restera dans les annales de l’histoire comme celui du » sans debats « . Certes, puisque Diouf avait déjà fait son choix et il était irréversible. C’est dire la complexité des deux figured emblématiques de l’histoire politique de notre pays.
C’est en 1997 si je ne m’abuse, alors que Tanor venait fraîchement d’être nommé directeur de campagne du Président Diouf que j’eus l’occasion de le côtoyer. Il devait se rendre à Richard Toll, à Ndombo Alarba précisément pour lancer l’ouverture de la campagne électorale. Dans la voiture qui quitta le palais pour le nord du pauys El Hadji Mansour Mbaye, Dié Maty Fall et moi-même. Dans mon papier de compte rendu, j’affublais Tanor du nom de » Al Gore » version sénégalaise . Je ne sais s’il avait apprécié ou non.
C’est l’occasion pour moi d’adresser mes condoléances les plus attristées à ma consoeur Dié Maty Fall qui, en peu de temps , a perdu deux êtres chers Tanor Dieng et l’industriel Amar.
Bouquet de fleurs enceint de regrets au pied de la République qui vient de perdre en la personne de Tanor Dieng l’un de ses plus dignes et loyaux serviteurs. Chapeau bas !
El hadji Amadou Mbaye
Journaliste. Conseiller en Communication du Cosec
