Torpillé en 1942 avec plus d’un millier de morts, le «Montevideo Maru» retrouvé en mer de Chine

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Par Assane Seye On Avr 23, 2023

Ce samedi 22 avril a constitué un jour important pour l’Australie. L’épave d’un cargo japonais de la Seconde Guerre mondiale, le Montevideo Maru, disparu il y a huit décennies, en 1942, a été retrouvé en mer de Chine méridionale, à 4 000 mètres de profondeur, a-t-on appris. Des centaines et des centaines de prisonniers australiens avaient perdu la vie dans ce naufrage, provoqué par un sous-marin américain.

Le 1er juillet 1942, le cargo mixte japonais SS Montevideo Maru vogue en mer de Chine méridionale, au large de la côte ouest de la principale île des Philippines, Luzon. Il compte à son bord environ 1 060 personnes, dont environ 980 Australiens qui ont été capturés par l’armée du Japon lors de sa conquête de Rabaul, sur l’île de Nouvelle-Bretagne, en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Parmi les Australiens, au moins 850 militaires. L’objectif est de les conduire sur l’île chinoise de Hainan, alors sous contrôle nippon, au nord de la mer de Chine du Sud.

Mais voilà, le sous-marin américain USS Sturgeon est tapi au fond de l’eau sur sa route. Il ne sait pas que se trouvent à bord, outre 88 Japonais, dont des gardes et une vingtaine de membres d’équipage, ces centaines de prisonniers de guerre australiens, mais également 33 marins du cargo norvégien Herstein, capturés également à Rabaul. En fait, sur le Montevideo Maru se trouvent des gens de nationalité britannique, danoise, estonienne, finlandaise, irlandaise, hollandaise, néo-zélandaise, salomonienne, suédoise, et même américaine…

L’USS Sturgeon ignore complètement tout ceci, et vers 2 heures du matin, sur la base du constat qu’il tient en joue un bâtiment ennemi, il attaque à la torpille. Tout le monde se retrouve piégé en cale à bord, alors que le navire, touché, sombre en à peine onze minutes. L’équipage japonais du Montevideo Maru reçoit l’ordre de l’abandonner, mais selon le gouvernement australien, tous les canots de sauvetage ont chaviré. Seuls 17 des 88 gardes et membres d’équipage survivront après avoir erré dans la jungle aux Philippines.

Le Montevideo Maru a été localisé le 18 avril dernier, à 110 km au large de Luzon. Les jours suivants ont ensuite servi à l’identifier. « Nous pensons qu’il a été touché par deux torpilles. La première l’a fait couler, la seconde a fait exploser une partie du logement », confie le capitaine Roger Turner, directeur technique de l’expédition. Le navire s’est scindé en deux ; il explique que la proue et la poupe ont été retrouvées à environ 500 mètres l’une de l’autre sur le fond marin. La fondation estime à environ 1 060 le nombre total de personnes qui ont péri, d’une quinzaine de nationalités, dont 210 civils.

« Nous avons eu des chercheurs japonais et des chercheurs américains qui ont aidé à assembler l’histoire », explique le capitaine Turner. Puis l’équipe a cartographié les lieux sous-marins sur cette base. « Le fond marin était en fait délicieusement plat », confie M. Turner, ce qui a permis d’identifier des obstacles significatifs, le navire, dès la troisième plongée du robot. Actuellement, ce drone effectue une recherche plus détaillée du champ de débris situé sous le navire, à la recherche d’indices pour établir la succession des évènements.

Silentworld a travaillé avec la société néerlandaise Fugro, spécialiste des relevés en haute mer, et avec le département australien de la Défense. « La découverte du Montevideo Maru clôt un chapitre terrible de l’Histoire militaire et maritime de l’Australie », se félicite le directeur de la fondation, John Mullen. « Les familles ont attendu pendant des années pour avoir des nouvelles de leurs proches disparus avant d’apprendre l’issue tragique du naufrage », ajoute-t-il. « Certaines n’ont jamais entièrement accepté que leurs proches fassent partie des victimes. »

Je ne peux qu’imaginer à quel point cela a dû être horrible. C’est au-delà de l’entendement.

L’épave ne sera pas dérangée : rien ni personne ne sera remonté à la surface. Et ce, par respect pour les familles des victimes, explique la Silentworld Foundation. Il s’agissait simplement d’apporter des réponses aux proches des disparus restés sans explication. Mais le Premier ministre Anthony Albanese s’est exprimé. « Le lieu où reposent les âmes perdues du Montevideo Maru a enfin été trouvé », s’est-il réjoui. « Nous espérons, ajoute-t-il, que les nouvelles d’aujourd’hui apporteront un peu de réconfort aux proches qui ont tant attendu. »

Le chef de l’armée australienne, Simon Stuart, a rendu hommage aux soldats, marins et aviateurs australiens qui s’étaient battus pour Rabaul avant d’être capturés et de périr dans le naufrage. « Aujourd’hui, nous nous souvenons de leur service et de la perte de tous ceux à bord, y compris les vingt gardes et membres d’équipage japonais, les marins norvégiens et les centaines de civils de nombreux pays », a-t-il dit, cité par ABC News. Le ministre de la Défense, Richard Marles, a salué Manille qui a autorisé cette recherche.

Ces Australiens n’ont jamais été oubliés. Perdue au plus profond des mers, leur dernière demeure est désormais connue. Cette découverte remarquable est le reflet de qui nous sommes en tant que nation.

Le gouvernement australien donne un peu plus de détails. Il relate que le Montevideo Maru avait été construit à Nagasaki en 1926. Avant que la Deuxième Guerre mondiale, une compagnie maritime d’Osaka l’utilisait entre l’archipel et l’Amérique du Sud – Montevideo est le nom de la capitale d’Uruguay. Puis la flotte impériale le récupère pendant le conflit, et l’utilise pour le transport de provisions et de personnes en Asie du Sud-Est.